ROCK BELGE / ALBUM SOUVENIRS
TUSH (1976-1978)
(version française remaniée par Jean Jième)
Charlie De Raedemacker et Walter de Paduwa
QUEL AVENIR APRÈS KLEPTO(MANIA) ?
À la dissolution de Kleptomania, (rebaptisé ensuite Klepto), les quatre musiciens se barrent chacun de leur côté.
Dany Lademacher part tenter sa chance en Hollande, Roger Wollaert entre dans Cos et Wim Hombergen ouvre l'Hospice, un bistrot situé rue de l'hospice Communal dans la charmante commune de Watermael-Boitsfort.
Mis devant le fait accompli, Charlie De Raedemacker (alias Charlie Maker) réagit aussitôt. Il recontacte Walter de Paduwa qui, à l'époque du Klepto, avait participé à plusieurs de leurs prestations en tant que chanteur.
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Bien qu'il ne se soit jamais investi dans aucune formation auparavant, Walter se montre enthousiaste à l'idée de participer à un groupe qui réunirait Charlie et Dany Lademacher.
C'est d'ailleurs la seule condition qu'il pose : il faut que Dany soit de la partie.
Charlie Maker : Alors que nous répétions chez moi à la maison, Walter se tourne vers moi : « Dis Charles, ce serait quand même bien d'avoir le Dan hein ? »
Et voilà comment les choses ont commencé.
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TOXIC COW-DUNG - SQUEEZE
Octobre 1976.
Au départ, le trio décide de travailler chacun de son côté à de nouvelles compositions. Après quelques semaines de labeur intensif, les trois compères se retrouvent chez Jacky, un copain de Charlie, qui leur met généreusement une villa à disposition pour mener à bien leurs répétitions.
Ils se cherchent un nom. Un moment, ils avaient envisagé Toxic Cow-dung. Trop hard ! Ils optent pour Squeeze.
Charlie Maker : On s'est retrouvé à Berg près de Zaventem. Dans ce lieu superbe mais également très froid, nous avons réalisé une maquette d'une quinzaine de titres qui, par la suite se sont retrouvés entre les mains de Jan D'Haese, nouveau et jeune producteur chez EMI.
À l'écoute des morceaux et malgré l'absence de batterie, Jan D'Haese se montre enthousiaste si bien qu'il fait écouter la bande à son boss Jeff De Boeck.
Résultat positif puisque la firme leur signe un contrat d'enregistrement... pour un album.
Reste à trouver un batteur. En Belgique, ils ne voient personne de disponible. Dany lance alors un appel d'offre sur le marché hollandais.
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Au bout de quelques jours, ce dernier reçoit un coup de fil de Kees Meerman, batteur de Herman Broods's Wild Romance. Il l'informe qu'Herman cherche un nouveau guitariste.
C'est une proposition impossible à refuser. Dany part aussitôt pour la Hollande. Il ne sait pas encore qu'il vient de mettre les pieds dans ce qui sera la grande aventure professionnelle de sa vie de musicien.
Mis au courant de la défection de Dany, EMI ne remet heureusement pas le deal en question.
Il faut souligner que Dany rassure tout le monde en déclarant qu'il participera pleinement à l'élaboration de l'album.
Il honorera pleinement sa promesse en ramenant avec lui le batteur Kees Meerman.
Squeeze
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T.U.S.H
Walter de Paduwa, Kees Meerman, Dany Lademacher, Charlie Maker
En janvier 1977, les quatre musiciens entrent en studio pour une durée de trois semaines. Ils ont choisi le Start à Buizingen. (plus tard, il sera rebaptisé le Swan).
Charlie Maker : Je me souviens de l'atmosphère géniale qui a régné durant ces trois semaines ; on travaillait de jour comme de nuit ; on dormait dans le studio à même le sol. On se sentait comme dans une piscine.
Jan D'Haese supervise le projet sous le pseudonyme de John Wooldridge avec le concours de Christian Ramon.
EMI avertit les musiciens qu'il existe un groupe britannique qui s'appelle Squeeze. C'est alors que Walter pense à T.U.S.H. ( tush - toucher).
Charlie Maker : Si on a rajouté des points après chacune des quatre lettres, c'est pour mieux brouiller les pistes. C'est Walter, un vrai fana de ZZ Top, qui en a eu l'idée à partir d'un des titres de leur album.
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L'album à peine achevé, Walter et Charlie se retrouvent face à un terrible constat : T.U.S.H. est totalement inconnu puisqu'il n'est jamais monté sur scène, faute de combattants. (Dany et Kees sont repartis pour Amsterdam), et la firme tarde à sortir le LP.
Durant de longs mois, Charlie et Walter se demandent quel sort s'acharne sur eux ? Eux, qui misaient sur le succès de leur album, espéraient en secret que Dany revienne pour se joindre à eux. Mais il n'en est rien !
Comment gagner sa vie dans de telles conditions ? C'est la grosse galère !
En mai, Dany et Kees font un saut à Bruxelles et se prêtent volontiers au jeu des photos pour la promo de cet album qui n'en finit pas de se faire attendre.
Ensuite , on les retrouve réunis à quatre dans les locaux d'EMI pour une émission filmée intitulée Rock en Belgique. Ceci reste un document exceptionnel. |
WE'RE JUST BOYS
Ce n'est qu'en septembre qu'EMI lance enfin son feu vert…. Un peu tard ! Intitulé Were Just Boys, l'album sort, affublé d'une pochette complètement ratée. Elle présente en plan buste Charlie et Walter, collés l'un à l'autre. Ridicule !
Charlie Maker : Cette pochette fut une véritable catastrophe. Une de plus, pourrait-on dire.
L'album aurait dû sortir en fixant l'attention sur le nom pour le moins original de T.U.S.H. et pas sur nos portraits à tous les deux Ça faisait penser à tout, sauf au rock'n roll.
Et puis, on a l'air si triste ! Sans doute savions-nous au moment où la photo a été prise que notre projet était déjà mort avant de commencer.
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WE'RE JUST BOYS / EMI Best Seller 4B058-23679
1977
-Atomic Slaugter
-No, No, No
-Miserly People
-I Am A Star
-Roosevelt And Ira Lee
-We're Just Boys
-Jeffrey
-My Dad Is Glad
-Greyhound Bus
-Don't Drink Anymore
L'album a été distribué en Belgique, Hollande, Allemagne, Espagne.
Dans les écrits qu'il a laissés, Charlie écrit :
"C'est fou ! Avec Klepto, on a réalisé des tas de disques qu'on a très peu vendus alors qu on a participé à des masses de concerts ; autant avec T.U.S.H on a vendu près de vingt mille exemplaires, mais on n'a jamais fait de concerts. Encore une belle anomalie du show- business!"
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NO, NO, NO
EMI Best Seller 4B006 23707 - 1977
Juste après la sortie du LP, EMI décide de sortir No No No en single. Charlie pense que ce fut une nouvelle erreur sur le plan du marketing.
Charlie Maker : Je pense sincèrement qu'une ballade comme Jeffrey, aux consonances Eagles aurait davantage séduit les DJ.que No, No, No.
Charlie décide prendre le taureau par les cornes. Pour remplacer Kees Meerman à la batterie, il fait appel à Driek et pour Dany, il donne sa chance à deux jeunes guitaristes de Tervueren, Franky Tommelein et Pieter Van Leeuwen. Ensemble, ils participeront à un show télévisé mémorable dans le cadre de l'émission de la BRT, Tienerklanken.
Charlie Maker : Nous sommes au Théâtre Américain. On nous a placés dans une loge susceptible d'accueillir un orchestre symphonique. Les pans des murs sont recouverts de miroirs énormes. |
Or notre guitariste Franky a une phobie : il ne supporte pas de se regarder dans une glace. Alors lorsqu'il apprend qu'il va devoir rester parqué des heures dans ce décor il sombre dans le délire.
Walter l'incite à boire un coup, alors que le gamin n'a pour ainsi dire jamais avalé une goutte d'alcool. Ambiance rock ‘n roll. Au bout d'un verre ou deux, pris de panique, voilà que Franky balance une chaise dans l'un des miroirs qui se fracasse, entraînant dans sa chute un beau grand lustre de style.
Résultat des courses, j'ai dû chopper l'animal en furie et tout habillé, je l'ai passé sous la douche. Il était trempé jusqu'aux os mais surtout bien calmé.
Lorsqu'il est monté sur le plateau, il traînait derrière lui de grandes flaques d'eau. J'ai même entendu un technicien dire : « Qu'est ce qu'il transpire le gars ! »
Après notre passage télé, on nous a signifié que nous n'étions plus les bienvenus à la B.R.T.
Par la suite, j'ai lu dans la presse néerlandophone une toute autre version de ce malheureux incident. J'y ai appris que Walter (un chouchou de la presse people de l'époque) aurait été blessé par des bris de glace !!!
Comme quoi , les ragots se créent à propos de tout et de rien.
Mail de Eric Van Renterghem, reçu le 23 décembre 2011:
"Le jour où Frankie a explosé le miroir, lors de l'émission à la B.R.T. le batteur c'était moi. Les semaines précédentes, nous répétions au Canotier, l'ancien Gémeaux. J'ai dû arrêter T.U.S.H. pour des raisons de santé. Au décès de Charlie, la vidéo de cette télé a circulé sur le net et de revoir ma tête après toute ces années, ça m'a fait un drôle d'effet".
http:// www.youtube.com/watch?v=XW_B3IHPJpU
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SURVIVRE À TOUT PRIX
Quand un groupe manque d'homogénéité, les transferts de musiciens vont bon train. Après le court intermède avec Driek à la batterie, ce dernier est remplacé par Dirk Vanganzbeke .
C'est avec cette récente composition de musiciens que T.U.S.H. se présente une nouvelle fois sur un plateau de télévision. Cette fois à la R.T.B dans le cadre de l'émission Folllies, où le groupe présente No, No, No.
Entretemps, Monin, le nouveau patron de l'ancien dancing les Gémeaux, les recueille chez lui, leur permettant d'enfin répéter de manière régulière. Dès lors de nouvelles compositions ne tardent pas à voir le jour.
Charlie Maker : Notre premier vrai concert à cinq s'est déroulé dans un petit village du nom de Bost (8 mars 1978). On en a profité pour tester nos nouvelles compositions : Cac, Just For Fun, Sweet Something, Femme Fidele, Sick Tonight, 68 Is Over.
Il y aura encore le 9 avril à Herzele , le 29 avril au Palais des Sports de Meise, le 30 avril à Wortel, le 5 mai à Archennes.
Charlie Maker : Dans l'ensemble rien de vraiment transcendant, juste quelques salles à peine plus grandes que des bouibouis.
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T.U.S.H. nouvelle formule à cinq
Une de leur dernière prestation publique se déroule le 26 mai sous un chapiteau à Watermael-Boitsfort. C'est l'ex-guitariste du Klepto, Wim Hombergen, qui a organisé l'événement.
Il a fait appel à plusieurs groupes de rock de manière à terminer le show en beauté avec une jam monstre qui réunit les quatre membres originaux du Klepto.
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BABY COME BACK/ROOSEVELT AND IRA LEE
EMI Best Seller 4B006 23746 - 1978
En juin, la firme EMI sort un second single avec en face A une version rock du célèbre hit des Equals, Baby Come Back.
Cette version a été enregistrée lors de la réalisation de l'album We're Just Boys. Elle était restée dans les placards de la maison de disques.
À ce propos, Charlie garde un sentiment amer :
Si les producteurs d'EMI ne nous ont jamais plus sollicités pour de nouvelles compositions, c'est parce qu'ils savaient que nous n'étions pas un groupe uni et que nous n'en avions plus pour longtemps.
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De fait, Walter de Paduwa en a marre, il décide de jeter l'éponge.
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THE END
Walter de Paduwa
Walter de Paduwa : Si les choses avaient mieux tourné avec les nouveaux musiciens ou si nous avions connu un quelconque succès d'estime, je pense que j'aurais continué. Mais ça n'a pas été le cas. J'admets avoir été le principal déclencheur de la fin de T.U.S.H.
Charlie Maker : On était en août. C'était la période où les festivals se succédaient un peu partout en Belgique. Nous avions plusieurs engagements en vue et Walter a déclaré forfait.
Mais, il existe une toute autre raison, beaucoup plus personnelle, pour expliquer la décision de Walter de quitter T.U.S.H.
Depuis le départ de Dany Lademacher, dont le brillant jeu de guitare a toujours focalisé l'attention, c'est Walter qui se retrouve au centre des projecteurs. Mais pas pour les mêmes raisons.
C'est que Walter est plutôt beau gosse et que de surcroit il chante superbement bien. La presse pop flamande ne s'y est pas trompée et se montre fort élogieuse à son égard.
Très vite Walter se sent piégé. Il ne supporte pas qu'on l'associe à un statut qui le rebute : celui de star... qu'on cherche à lui imposer.
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Walter de Paduwa : Lorsque j'ai accepté de participer à l'aventure de T.U.S.H. avec Charlie, j'avais demandé que Dany Lademacher nous rejoigne. Hélas, il n'est pas resté longtemps puisqu'il est parti rejoindre Herman Broods à Amsterdam !
Walter et Charlie
Ainsi, du jour au lendemain, j'ai été propulsé comme une sorte de rock star à la belge. Pour moi rien ne justifiait un tel engouement. Je ne me suis jamais considéré comme un chanteur de haut niveau. Je suis avant tout un fan de musique, influencé par tant de voix formidables que je me sens incapable de trouver la mienne.
Lors de la création de l'album, j'ai ressenti un profond malaise en interprétant I Am A Star. J'ai toujours détesté cette chanson. Ce n'est que quelques mois plus tard, que j'ai compris pourquoi ? La presse la rattachait à moi. Alors je me suis dit qu'il était temps de retourner à mon ancien job de vendeur de disques.
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LE MOT DE LA FIN
Charlie a tenté de continuer avec les autres musiciens rescapés. Franky Tommelein est devenu chanteur et a appelé le nouveau groupe Superhuit.
Ensemble, ils ont travaillé des mois à créer de nouveaux morceaux. Une bande demo a été réalisée dans le studio privé d'Alfie Falckenbach avec l'apport de Chris Ramon, ingénieur du son.
Le jour où Superhuit fut convoqué pour s'engager par contrat chez Alfie, un des guitaristes brilla par son absence. On le chercha un peu partout. Il n'était pas loin, sinon dans le café d'en face. Mis devant ses responsabilités, ce dernier refusa de signer !
La messe était dite.
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Cette biographie a pu être réalisée grâce au notes laissées par Charlie Maker et grâce au
travail de Pascal - webmaster du site Belgian Metal History.
http://www.belgianmetalhistory.be/html/bands/tushtush/tushtush.html |