BIBLIO ROCK

 

Retour sur la page BIENVENUE

Chapitre 1 : Cravate

 

Chapitre 2 : "Un individu malfaisant"

 

Chapitre 3 : Summer 69

 

Chapitre 4 : 1969, l'année du siècle

 

Chapitre 5 : Dawn of the seventies

 

Chapitre 6 : Wight 70

 

Chapitre 7 : La Ferme!

 

Chapitre 8 : fin 1970 L'explosion

 

Chapitre 9 : Déglingue du rock belge

 

Chapitre 10 : Monstres Sacrés

 

Chapitre 11: Charisme

 

Chapitre 12: Glam Rock - Le Schisme.

 

Chapitre 13: Rock 73

Genesis-Jemelle-Bilzen

 

Chapitre 14: Rock 74

Stones - Rapsat.

 

Chapitre 15: Les grands concerts de 1974

 

Chapitre 16 : Rock et Journalisme

 

Chapitre 17 : Épilogue

 

 

 

LIVRES-ARTISTES

 

Machiavel 40 ans de musique

 

La France et les Beatles (Hocquet-Krasker)

 

Beatles Jours de vie Richard Havers

 

1969 - Année Rolling Stones - Let It Bleed

(Ethan Russell)

 

Qu'en pense Keith Richards ?

(Mark Blake)

 

Cliffhistory

(Robert Morgan)

 

The Man Who Led Zeppelin

Chris Welch

 

Elvis - Last train to Memphis-Careless Love

P.Guralnik

 

Elvis en devenir Alfred Wertheimer

 

Chuck Berry - Long distance information (Fred Rothwell)

 

Jacques Dutronc

(Michel Leydier)

 

Johnny et Nous : 50 ans de rock

J.Q. Gérard

 

Johnny Sixties

(J.P. Leloir)

 

Hallyday-Derniers secrets

Przybylski

 

Rock'n'Romance Nanette Workman

 

 

LIVRES-AUTEURS ROCK

 

Autant en emporte le rock

(J.N.Coghe)

 

Amougies 24/28 octobre 1969

(J.N. Coghe)

 

Coeur de Rock

(Piero Kenroll).

 

L'école de Canterbury

(Aymeric Leroy)

 

Ancienne Belgique, salle de légende

Johan Ral

 

Golden Years

(Paul Coerten).

 

Smalls (Small Faces)

(J.N.Coghe)

 

Nos années Salut les Copains

Christophe Quillien

 

The Big Beat Scene

Royston Ellis

 

Jésus prend la mer

(James L.Burke)

 

Rock Critics

Feel like going home (P.Guralnik)

 

Antibes Juan-les-Pins-50 ans de jazz 

 

American Rock'n roll UK Tours 1956-72 (Ian Wallis)

 

Rock and Roll duo Kenroll-Guyaut

 

50s Today

Charles Chojnacki

 

 

CONCERTS

 

James Burton au Spirit 26/04/2010

 

Paul Anka Forest National 21/11/2009

 

Cliff Richard Forest National 8/11/2009

 

DVD

 

Dusty Springfield

 

Paul Anka Rock Swings - 2009

 

Cliff Richard Final Reunion - 2009

 

Marty Wilde : 50th Anniversary Concert 2007

 

FILMS

 

Vince Taylor -Chemin de la mauvaise route

 

Cliff Richard - Filmo

 

ÉMISSIONS TÉLÉS

 

Pop TV Hollande 1960-1975

 

CHRONIQUE 1960-1965 CHRONIQUE 1966-1972 CHRONIQUE 1973-1980 LES PIONNIERS DU ROCK GROUPES BELGES
BIBLIO ROCK CINÉS DU CENTRE VILLE CINÉS DE QUARTIER PROGRAMMATION TOUT BRUXELLES CINÉ DOCS
 

LIVRES - ARTISTES - ROCK

JACQUES DUTRONC - LA BIO

MICHEL LEYDIER -  Seuil

 

Dutronc Memoire60

La couverture de la nouvelle édition de cette biographie de référence montre tout d'emblée. Les lunettes noires, sur le fin visage qui est l'écrin d'un esprit subtil, mettent en valeur son atout majeur, qui symbolise toute une carrière: son sourire, un petit clair de lune ironique, signe visible de son détachement, de son recul, de sa capacité exceptionnelle à tout voir par le bout cocasse et poétique de la lorgnette du mental. Chez lui, elles ne sont pas l'accessoire aussi permanent que ridicule de certains rebelles d'opérette, mutins de Panurge et rockers institutionnels.

 

Des bouffons des rois Médias: avatar pluriel de l'antique roi Midas, qui changeait en or tout ce qu'il touchait. Plus que jamais, Dutronc reste un chanteur-caméléon, un tempérament fantaisiste, riche, mystérieux et insaisissable par moments, jamais fermé à l'idée d'une franche partie de gaudriole ou d'un canular pendable à infliger à l'une ou l'autre victime, désignée par la fatalité de son bon plaisir. Et de celui de ses potes inséparables. Il pourrait reprendre Les Copains d'abord du bon Georges, le Jacques... 

 

LA BIO - SECOND TOUR

 

En 2004 est parue la première édition de cette biographie, avec l'entière coopération du sujet, dont l'entourage professionnel avait sollicité l'auteur, l'écrivain et nouvelliste Michel Leydier. Le retour triomphal de Dutronc sur scène en 2010 - dès le 8 janvier à Évry - a justifié la parution d'une nouvelle édition non revue, mais augmentée. Les ingrédients supplémentaires, pour ceux qui ont (ou ont lu) la première édition: toute la genèse détaillée de cette tournée pas évidente du tout au départ, bien mise en lumière. Sans oublier le rôle décisif, au départ, du très talentueux fiston Thomas.

Un beau cahier photos enrichit l'ouvrage.

 

 

DUTRONC  SA VIE, SON OEUVRE, SES POTES

 

Michel Leydier nous livre le récit de diverses rencontres avec le chanteur-acteur, à Paris et aussi dans son magnifique antre corse (on l'envie !) à Monticello, en Corse. Le procédé narratif choisi est celui des bonds dans le temps: de Monticello 2003 (canicule) aux studios Vogue en 1962, etc.  Peut-être pour éviter une linéarité un peu lassante: et cela fonctionne. 

Dutronc est un enfant de la guerre (né dans la nuit du 27 au 28 avril 1943): un pur produit du baby-boom, né la même année que son pote Jean-Philippe Smet. L'auteur a recueilli les témoignages de ses proches: son père Pierre et son frère Philippe, et bien entendu une flopée de compagnons des premiers jours notamment.

Les souvenirs du «découvreur» de Dutronc Jacques Wolfsohn, ou du preneur de son André Bernot, sont cruciaux. Sans oublier le fidèle guitariste des Cyclones, Hadi Kalafate, ou le deuxième batteur du groupe (qui a fait beaucoup de chemin depuis) André Crudo. Pour ne citer que ceux-là. Leydier n'a pas rencontré le chanteur El Toro (Daniel Dray), un rocker pur et dur qui se flatte encore aujourd'hui de posséder une des médailles de Gene Vincent.

 

 

EL TORO ET LES CYCLONES

 

Jacques Dutronc est le guitariste soliste et meilleur élément de ce groupe qui n'a jamais pu lutter, le temps de deux malheureux 45 tours chez Vogue, avec les leaders du rock and roll français (non du yé-yé, inexistant en 1962) : les Chats Sauvages et les Chaussettes noires. C'est déjà la vie de tournée, déjà les petites nanas que l'on collectionne, avant de devenir une idole quatre ans plus tard.

 

Une anecdote stupéfiante: lors de leur tournée estivale de 1962 avec une étoile pâlie des disques Vogue, le clarinettiste André Réwéliotty, Dutronc se venge du musicien chevronné qui vient de le snober, en lui annonçant sa mort prochaine. Quelques jours plus tard, l'infortuné jazzman - qui figurait au programme de Bechet le 19 octobre 1955, le fameux soir où on a cassé l'Olympia - se tue en voiture sur une route de Bretagne. Pourquoi les Cyclones n'y sont pas montés ce jour-là ? Un des grands mystères de l'histoire de la chanson !

 

 

TRANSITION

 

Les Cyclones se produisent dans la série de shows légendaires de Gene Vincent au théâtre de l'Étoile aujourd'hui disparu, la dernière semaine d'octobre 1962. Ils accompagnent une magnifique jeune rockeuse très brune, une autre recrue de chez Vogue dont la carrière se voit brisée net par un accident de voiture: Micky Amline, incidemment une adoratrice de Gene Vincent.

 

Mais bientôt c'est la carrière du groupe qui s'arrête dans sa première formule, pour la raison habituelle: on change les costumes gris clair ou fuchsia, pailletés ou non, et le noeud pap twist éventuel pour le rugueux uniforme kaki des bidasses malgré eux. Dutronc entame en Allemagne sa formation de vaillant défenseur de la France. Il a échappé de peu à sa réquisition militaire en Algérie, à quelques mois près - la chance, comme celle de Johnny, Eddy et des autres, qui sont nés juste assez tard pour y couper ! Alors que ce bon Dick, sans publicité intempestive (euphémisme) a réussi pour de bon à se faire réformer.

 

Mais pendant ce temps, les premières royalties se déposent gentiment sur le compte en banque du guitariste et compositeur.

 

Il a écrit Fort Chabrol , devenu Le Temps De L'Amour : le deuxième gros succès d'une certaine Françoise Hardy.

 

 

Qui vend bien ensuite une autre composition (oubliée maintenant) de Dutronc, qui ne connaît pas encore personnellement la chanteuse: Va Pas Prendre Un Tambour.

 

À sa démobilisation au printemps 1964, il accompagne un temps Eddy Mitchell sur scène. Tout en faisant ses classes comme directeur artistique; pas vraiment aux disques Vogue, comme la légende le colporte, mais aux éditions Alpha, avec Jacques Wolfsohn, le découvreur de Johnny et Françoise Hardy.

 

Saluons le côté précurseur de la chanteuse et de son mentor: puisqu'elle est vraiment la toute première jeune vedette de cette époque, dans le courant Johnny, Sylvie, Eddy etc. à chanter une très grosse majorité de chansons originales. Une tendance qu'Antoine, et à sa suite Polnareff puis Dutronc vont amplifier et consolider. En tordant le cou au reproche récurrent selon lequel les jeunes artistes français et leurs collaborateurs sont incapables de proposer des productions originales.

 

Dutronc, assistant de Wolfsohn, écrit des chansons pour plusieurs artistes: surtout des chanteuses dont la plus connue (relativement) est Zouzou, une égérie des nuits parisiennes, et de Brian Jones aussi, et comédienne à ses heures.

 

LES FILLES AIMENT JACQUES

 

La vraie histoire du passage de Dutronc à la chanson, par hasard, a souvent été déformée. Michel Leydier l'éclaircit une fois pour toutes, avec l'histoire mettant en scène les protagonistes: Wolfsohn, le chanteur éphémère Benjamin, et le fidèle et ineffable acolyte Hadi Kalafate, dont l'essai vocal n'est pas jugé convaincant.

 

Michel Leydier nous narre précisément l'arrivée de Lanzmann, ô combien cruciale. Jacques Dutronc chanteur fait l'effet d'une bombe. Son style, dès le premier disque avec Et Moi, Et Moi, Et Moi , et Mini-Mini-Mini , est directement influencé par le son anglais, Stones ou Kinks, qu'il adore.

 

Tout en ne reniant jamais Elvis, Eddie Cochran et Django Reinhardt, sans oublier les grands de la chanson française comme Trenet. Sectarisme connais pas. On se souvient qu'en cette année 1966, une grande polémique est artificiellement créée par l'entourage de Johnny, avec les médias qui se frottent les mains: lors de la sortie de Cheveux longs et idées courtes, considéré comme une charge anti-Antoine; Johnny contre Antoine. 

 

Mais on a un peu oublié l'autre rivalité, plus réelle: celle opposant Dutronc au même Antoine, lequel indispose alors prodigieusement Hugues Aufray en devenant une idole-éclair avec toute l'imagerie Dylan, qu'Aufray, lui, s'évertue avec un acharnement sincère à faire connaître sans le moindre aspect parodique !

Copains, jusqu'à un certain point...

 

 

 

 

HYSTÉRIE

 

Premier EP de Dutronc en juin 1966: un coup de maître artistique et commercial; premiers pas en public comme chanteur dès juillet, sur le devant de la scène cette fois. En commençant par le nord de la France, avant deux apparitions à l'Olympia, dès septembre puis décembre 1966, dans des programmes variés, et pas en vedette. Celui du 6 décembre est «L'Épopée du Rock», avec notamment Los Bravos, Manfred Mann et les Moody Blues. Rejet des fans de rock ? Non, Jacques séduit tout le monde, critique de Rock and Folk compris...Un mensuel rock dont il fera trois fois la couverture dans sa carrière. Dutronc apporte une dimension manquante jusque là dans les shows pour jeunes (Vassiliu ou Boby Lapointe n'ayant frayé que marginalement avec la grande vague teenager). À savoir: l'humour, la parodie. En septembre 1966, une nouvelle star triomphe à l'Olympia.

 

Dans un tout autre genre, qui suscite la passion ou l'allergie totale: Mireille Mathieu ! Un sujet d'imitation irrésistible et impitoyable dans les joyeuses prestations de celui qui chante bientôt Les Play Boys, avec une dérision qui n'empêche pas, dans ce domaine, une expérience digne de respect et d'admiration. Il aime les filles ! Les disques s'arrachent, la TV le réclame à cor et à cri, et Dutronc et ses camarades s'en donnent à coeur et souvent à corps joie, à commencer par le patron. Un groupe qui l'accompagne un bon moment est les Mods, avec Alain Legovic aux claviers. Le futur Chamfort, sous l'égide du beaucoup moins drôle Claude François, auquel il échappe comme il se doit pour mener sa carrière à sa guise. 

 

Les anecdotes des séances d'enregistrement sont truculentes. Les galas se suivent et ne se ressemblent que sur le plan de la bonne humeur et de la farce. Dutronc n'hésite pas à provoquer son public de toutes les façons, apparaissant parfois avec une cuvette de WC en guise de collier. Il y a le fameux épisode des Cactus, avec Pompidou à l'Assemblée nationale, en avril 1967.

Ces galas en province où Trenet ou Tino Rossi se font jeter par un public ne connaissant que Dutronc, suscitant un vrai malaise chez celui-ci. Ses escapades au Maroc, alors que ce pays commence à séduire des stars du rock comme Hendrix ou Brian Jones. Case drogues dures en moins. Mais Jacques, on le sait, a toujours préféré le vin d'ici à l'eau de là, à doses parfois sérieusement excessives.

 

En p.134, Michel Leydier donne un témoignage d'un des meilleurs et plus vieux amis de Dutronc: Kalafate, qui explique que, devenu star, Dutronc a commencé à ressembler à sa caricature, à être snobé par son propre personnage. Fumeur (gros cigares, pas de tabac à rouler !), dragueur, superbe bureau, ce qui semble aller contre sa nature profonde, selon le guitariste et chanteur occasionnel Kalafate.

Un petit reproche: l'auteur, justement, ne pipe mot des deux tentatives chantantes de Kalafate, produites par son boss et ami, qui le rebaptise «L'émir du rythme». On pense surtout à l'immortel À La Plage Je Suis Un Jules: cela existe vraiment - 1969 !

 

Cette relation de confiance et de complicité, jamais les deux Jacques ne l'auront vraiment établie. Feu Lanzmann n'a pas accepté d'interview pour cette biographie. Il semble que Dutronc ait collaboré et apporté des idées à de nombreux textes du futur globe-trotter moustachu et écrivain de talent. Il eût aimé en être crédité, pas seulement en tant que compositeur. Mais les articles des années soixante ne dévoilent rien de ce genre...

Sauf omission de ma part.

 

À DEUX OU À TROIS

 

Malgré cette absence d'empathie entre les deux hommes, deux très fortes personnalités pourries de talent, tout le monde reconnaît que le couple artistique Dutronc-Lanzmann est entré dans la légende. Cela dès le tout premier disque, avant une longue brouille et des retrouvailles semi-ratées en 2003 pour l'album Madame l'Existence .

 

Mais je vous pose la question: voici une série de succès de Dutronc, en éliminant les chansons moins connues. La Publicité - Le Plus Difficile - Fais Pas Ci, Fais Pas Ça - L'Opportuniste  et même celui que beaucoup considèrent comme son chef- d'oeuvre, élu comme chanson du siècle par un hebdomadaire français il y a quelques années (sans que l'on soit obligé d'entériner ce choix, mais c'est un autre débat) Il Est Cinq Heures, Paris S'Éveille . Regardons les crédits de ces titres: ils sont tous dus au TRIO Dutronc - Lanzmann - Anne Ségalen ! Ségalen qui était l'épouse de Lanzmann. Quel a été le rôle exact de cette dame dans l'écriture de ces chansons emblématiques de Dutronc ? À aucun moment, Michel Leydier ne soulève le voile. On ne sait pas s'il a cherché à la rencontrer: elle n'obtient qu'une petite mention ici ou là, en passant. Un dossier entrouvert et non traité...

 

DUTRONC ET SES REPRISES

 

Ce qui précède permet de ressentir un petit regret concernant ce travail, réalisé pourtant avec sérieux et empathie. Lorsqu'il aborde les années 70, Leydier évoque sa carrière de chanteur qui décline progressivement, et il s'attache normalement à nous narrer un maximum de péripéties intéressantes sur l'acteur Dutronc. Il est en quelque sorte révélé comme comédien par son ami le photographe, devenu cinéaste (et aujourd'hui écrivain également) Jean-Marie Périer. Dutronc impressionne même Spielberg, qui doit renoncer à le faire tourner, à cause de sa réticence à apprendre l'anglais.

 

Mais en pleine ascension cinématographique, à l'été 1973, le très bon groupe anglais Mungo Jerry obtient un énorme tube avec Alright, alright, alright ... Leur adaptation d' Et Moi, Et Moi, Et Moi. Une version trépidante d' Il Est Cinq Heures ... est due à notre compatriote An Pierlé.  The Divine Comedy et son chanteur Neil Hannon, est un groupe nord-irlandais qui vénère Dutronc (et l'inévitable Gainsbourg) et le reprend sur scène. Rien de tout cela dans Jacques Dutronc La Bio .  Un petit mystère dont l'auteur ne s'est pas occupé (on ne peut penser à tout): le trio Renoma-Cardin-Dior !

 

Dans Les Play Boys , Dutronc chante les petits minets habillés par Cardin. Aujourd'hui, on le présente toujours comme ayant été dans les années soixante une égérie (au masculin, pourquoi pas !) des frères Renoma. Maurice Renoma étant toujours actif rue de la Pompe à Paris, avec ses expos ponctuelles (comme Hendrix) qui agrémentent son lieu de vente de vêtements jeunes et chic(s). Mais je n'ai nulle part trouvé trace de son association avec les Renoma dans les articles d'époque, contrairement à celle de Françoise Hardy avec Courrèges et Paco Rabanne. Et pour simplifier le tout, les amateurs connaissent une photo ancienne de Dutronc et Zouzou, souriant devant une boutique...de Dior !

 

Jacques Dutronc a pris le contre-pied systématique de la mode des vêtements fantaisistes de l'époque. Ses costumes de bonne coupe mais d'allure conservatrice fournissent un effet de contraste avec la fantaisie ébouriffante de notre artiste, qui s'autorise tout de même un sombrero ou des vêtements orientaux sur l'une ou l'autre pochette de disque, ou dans les pages de Salut les Copains. Dues à Jean-Marie Périer dès qu'il s'agit de son ami inséparable Dutronc, celui qui lui a pris sa fiancée Françoise sans qu'il ne trouve à y redire, nouant au contraire une amitié intense avec celui qu'il aurait pu haïr selon le schéma amoureux éternel. Une vraie relation à trois, avec Françoise qui reste l'amie fidèle des jours fastes ou non de Périer.

 

 

On ne s'attarde pas ici sur le versant Dutronc-Hardy de cette biographie. Il est bien là, et on peut s'amuser à le comparer avec les souvenirs de Françoise dans son autobiographie à succès Le Désespoir des singes et autres bagatelles (Robert Laffont, 2008).

Le succès scénique de Dutronc, y compris en Belgique, reste toujours aussi éclatant en cette année 2010.

Et on se demande bien quelles surprises ce diable d'homme nous réserve encore.

La trilogie Jacques-Thomas-Françoise reste pour longtemps une magnifique constellation dans un ciel gris et morne de variétés formatées. Chapeau (sombrero disons !) les artistes, et merci à Dutronc pour Madame son existence, qui a beaucoup apporté à celle de beaucoup d'entre nous.

 

 

LE COIN DU SPÉCIALISTE

 

Cette biographie, toute remarquable qu'elle soit, pèche de temps à autre par quelques petits défauts de finition. Des noms propres et prénoms mal orthographiés: Charles«Bénaroch» (Benarroch), Cliff «Richards» (Richard),«Henry» (Henri) Leproux, Micky «Ameline» (son vrai nom, mais Amline est son nom d'artiste)..., Le Système «Crapoutchic» (Crapoutchik)... Ou cet ancêtre du synthé (p.137), le «mélotron» (mellotron). 

 

P.75 André Crudo mentionne Walk Don't Run «de Chet Atkins»: c'est le classique des Ventures. Leur plus gros succès, l'équivalent américain d' Apache des Shadows.  

 

P.98 Michel Leydier découvre Dutronc au Maroc, où il vit alors. Grâce au transistor. Qui parle encore de transistor aujourd'hui, on se fait cette réflexion !

 

 

Leydier ajoute qu'il n'y a pas encore de télévision au Maroc... Alors que de jeunes artistes se produisaient dès le début des années soixante à l'émission de TV marocaine Télé Club ! Bizarre...La télévision sans doute réservée encore à une infime minorité dans ce pays: c'est bien possible.

 

P.123-124  Contradiction pour la date de sortie de L'Opportuniste , située en juin puis en septembre 1968 ! Ce titre, successeur d' Il Est Cinq Heures ..., est bien paru au début de l'été, après la tourmente de mai 68 qui a fortement affecté la vie du show-business français.

 

P.127  L'article «Tout dans la tête» n'est pas paru dans Salut les Copains en 1969, mais en septembre 1970.

 

 

QUELQUES PRÉCISIONS

 

Quelques petites précisions qui présentent un petit intérêt au moins, je l'espère ! Pour trois titres connus.

 

LE TEMPS DE L'AMOUR

 

Dutronc a composé Fort Chabrol, un titre instrumental des Fantômes, attribué à Dutronc et au guitariste Dean Noton; ce dernier viré ensuite des crédits ! Avec des paroles d'André Salvet et Lucien Morisse, il est devenu, sous le titre Le Temps De L'Amour, le deuxième tube (immense) de Françoise Hardy. Contrairement à ce qu'écrit distraitement Michel Leydier, Hardy n'est déjà plus inconnue du tout à la fin 1962, lors de la sortie de ce titre. Il a été créé par Colette Rivat, et repris chez Vogue par José Salcy et ses Jam's,  avant le carton réussi par Françoise.

 

LES PLAY BOYS

 

Selon  L'Express du 13 mars 1967, l'expression «crac boum hue» (dans Les Play Boys ) est née dans le square de la Trinité «il y a six ou sept ans», donc vers 1960. Un langage d'onomatopées de la bande: Dutronc, les futurs Johnny et Eddy... On mentionne déjà l'expression «parler yaourt», peut-être elle-même apparue en 1967 du coup ! Mais je ne suis pas linguiste...

 

LES CACTUS

 

C'est le 20 avril 1967 (non le 22, comme cela a pu être écrit) qu'a lieu la fameuse allusion pompidolienne, restée depuis lors dans les annales, aux cactus. Cela s'est passé dans le Palais-Bourbon, en fin de débat de politique générale à l'Assemblée nationale.

 

 

Sans entrer dans tous les détails politiques et de personnes, la diatribe de Pompidou contre la gauche unie et Mitterrand disait: «Il y a longtemps que la vie m'a appris», comme dirait Jacques Dutronc,« qu'il y a un cactus.»

 

Une autre allusion du monde politique à ce titre piquant s'est produite aux Floralies d'Orléans le 23 avril 1967, dans la bouche d'Edgar Faure, alors ministre de l'Agriculture. Cela à l'inauguration des Floralies internationales. Il pose...devant un cactus ! Et il déclare ce qui suit...«La fleur a un caractère social et même politique depuis que le président du Conseil...pardon le Premier ministre...à la suite de Jacques Dutronc, a fait l'éloge du cactus.»

Enfin, remarquons que Pompidou ne faisait que rendre la monnaie de sa pièce à l'idole ! Dans son premier disque, on trouve J'ai Mis Un Tigre Dans Ma Guitare avec ces mots «un Pompidou dans ma guitare» !

 

LES ENREGISTREMENTS

 

Un extrait d'interview très intéressant du chanteur, dans Rolling Stone (France) de janvier 2005. «Dès les sixties, vous vous intéressez à la technologie liée à l'enregistrement ?»

«C'était assez restreint. L'écho magnétique, fait avec un magnéto Revox, c'était déjà du luxe.Il y avait le varispeed, ils mettaient le truc à fond pour qu'il n'y ait plus d'aigus. Je leur disais: «Attendez, les gars, on dirait Donald !» «Ouais, mais il y a plus d'aigus, on laisse comme ça ! Chez Vogue, ils étaient fâchés avec la basse, toute leur gravure explosait à chaque fois !»

 

 

 

 

CONCLUSION LONDONIENNE

 

Un stupéfiant dithyrambe anglais est paru dans le Melody Maker , le 18 mars 1967, pour son premier album. Il servira de conclusion inattendue, lisez plutôt !

 

«Branchez-vous tous sur Jacques Dutronc ! Il est le Bob Dylan de France, il est le Roger Daltrey de Paris, et un Français qui ressemble à Jeff Beck. Pour une raison incompréhensible, le public anglais doit encore réaliser quel miracle est Dutronc, mis à part une petite coterie de fans très branchés qui sourient en connivence quand des titres comme "Mini-Mini-Mini" ou "On Nous Cache Tout, On Nous Dit Rien" sont mentionnés, et ils retroussent leurs lèvres avec pitié contre ceux qui critiquent les délices de "J'Ai Mis Un Tigre Dans Ma Guitare". Jacques a des intonations plutôt comme Dylan, (il) utilise un beat "cloppant" typiquement français, et un groove qui est du Dutronc pur. De gros tubes comme "Et Moi, Et Moi, Et Moi" et "Mini-Mini-Mini" sont inclus.

 

                                                                              

 

  CHRISTIAN NAUWELAERS